Détruire le bac, c'est faire disparaitre le dernier obstacle à la mise en place du fameux continuum BAC-3/BAC+3 qui, demain, permettra enfin la désagrégation de la licence universitaire et l'appauvrissement continué du lycée, sources d'économies tant espérées par les ministères sucessifs.
Pour cela, tout a été bon. L'instauration rapide et successive de plusieurs contre-réformes bricolées, sans recul ni évaluation, destinées à échouer afin de mieux justifier ensuite leur supression et avec elles tout caractère réellement équitable et national du soi-disant nouveau BAC.
En moins de trois ans, le basculement en contrôle continu intégral de nombreuses épreuves, l'instauration d'une épreuve dite "de grand oral" de pure forme au détriment du fond, l'émergence d'algorithmes secrets de sélection des futurs étudiants via parcoursup et l'appauvrissement discipinaire drastique des enseignements de lycées auront bientôt eu raison des dernières exigences et de toute forme d'équité ou d'excellence au sein des établissements.
Un bac bradé, trafiqué, à la carte, asservi au local, aux résultats ajustables (par des commissions qui tiendront finalement peu compte des notes saisies par les enseignants) n'a plus aucun sens et signe le plus haut renoncement à la mission d'instruction publique, qui pour mémoire ne consiste pas à formater de futurs adultes communicants mais bien à instruire et former des citoyens éclairés.
C'est en tout cas la vision que le SNCL défend et c'est la raison pour laquelle nous dénonçons aujourd'hui trois points fondamentaux du travail de sape mené par le ministre.
1 / Non au P(L) E !
Le projet local d'évaluation (renommé projet d'évaluation après que M. Blanquer s'est rendu compte que l'adjectif "local" révélait un peu trop l'intention véritable de cette mascarade) n'a aucun fondement réglementaire. Il ne relève en aucun cas des obligations statutaires des enseignants. Il va même à l'encontre de leurs statuts qui (jusqu'à ce jour au moins) leurs garantissent encore la liberté pédagogique individuelle.
Aucun enseignant ne doit se voir imposer, ni par la direction administrative de son établissement, ni par un quelconque conseil pédagogique, la manière qu'il estime être la meilleure d'évaluer ses élèves. Aucun conseil d'administration, aucun chef d'établissement, aucun règlement intérieur n'est en droit d'imposer à un enseignant comment, quand, combien de fois et avec quels coefficients il compte évaluer ses élèves, ni de lui faire renoncer à certaines formes d'évaluation (formative, normative,...) au profit d'une seule. Le professeur reste souverain dans sa classe et ne reçoit de conseils en matière pédagogique que de son inspecteur disciplinaire.
Si nous sommes aujourd'hui assommés, décontenancés, sous pression constante et nous sentons isolés, il est temps pour nous de réagir et de nous rassembler !
Le SNCL invite tous les collègues à boycotter toute réunion et toute activité organisées en vue de la constitution d'un PE. Les collègues qui ont déjà été contraints par la désinformation ou l'intimidation à ficeler ce PE doivent réagir : ce projet n'est pas obligatoire et rien ne les empêche de se dédire et de refuser de s'y conformer.
Le SNCL encourage tous les collègues à continuer la pratique et la fréquence des devoirs de leur choix, ainsi que l'attribution des coefficients de leur choix, en toute liberté, selon ce qu'ils jugent le plus adapté à chacune de leurs classes, ce qui d'ailleurs leur incombe statutairement. Nous savons tous qu'une division ne fait pas l'autre et qu'une approche évaluative qui fonctionne avec un groupe sera inefficiente avec un autre. Il est impossible de renoncer à cette marge d'ajustement pédagogiquement essentielle juste pour faire plaisir à Bercy qui considère ne plus avoir les moyens de payer aux jeunes Français l'organisation, l'encre et le papier d'un vrai bac national.
2 / NON aux rattrapages imposés !
Avec les nouvelles règles de ce pseudo-bac, nos élèves ont d'ores et déjà compris l'intérêt comptable qu'il y avait pour eux à esquiver certains devoirs. Les stratégies d'évitement se multiplient et ce fléau ne fait que commencer. A ce rythme, ce sont bientôt des cohortes entières d'élèves qui se feront passer pour défaillants pour lesquels il faudra produire un travail supplémentaire, organiser des créneaux de rattrapage et offrir des sujets alternatifs...
Actuellement, les positions adoptées à cet égard varient énormément d'une académie à l'autre, voire d'un établissement à l'autre. Alors que certains lycées semblent de bonne volonté pour appliquer à la lettre la circulaire (l'organisation des épreuves de rattrapage incombe au chef d'établissement), d'autres commencent déjà à lorgner sur les enseignants en comptant sur leur bénévolat ! On leur réclame non seulement de faire le travail administratif de suivi et de comptage des absences, mais aussi de prévoir les emplois du temps et les créneaux de rattrapage, d'en assurer la surveillance (sur leur temps libre !), de trouver eux-mêmes une salle et de fournir un sujet ! peut-être devront-ils aussi balayer la classe après l'épreuve et assurer le repas de cantine à la pause midi ??
Le SNCL appelle tous les collègues à s'en tenir à l'application stricte de la note de service du 28 juillet 2021 (2E) : les épreuves sont organisées par le chef d'établissement et suivent le format des épreuves des candidats individuels (sous la responsabilité du rectorat). Nous invitons les collègues à ne pas prendre en charge l'organisation de ces épreuves dites "de rattrapage". Nous devons refuser toute inscription de telles obligations dans les règlements intérieurs des établissements qui n'ont d'ailleurs aucune légitimité pour imposer une quelconque règle de notation.
Pour en savoir plus sur le sujet, à lire : Nouveau bac, choses vues (et entendues) en CA...
3 / En finir avec la mascarade du grand oral
De par sa nature même, le grand oral s'est présenté dès le début comme une épreuve anti-humaniste et inéquitable. Accompagné de grilles d'évaluation d'une imprécision flagrante, il a donné lieu lors de sa mise en oeuvre à des écarts de note si larges d'un jury à l'autre que son résultat s'apparente davantage à un jeu de la chance pour le candidat qu'à une réelle estimation de ses capacités d'éloquence. Le fait, par ailleurs, de privilégier cette éloquence à la solidité du contenu avancé, nous renvoie à des temps bien mornes pour la pensée savante, où l'imitation et la forme prévalaient sur l'innovation et le savoir. Alors que les candidats sont évalués par des jurys de trois personnes, ces jurys sont bien souvent constitués à la dernière minute et de professeurs qui soit n'ont pas les moyens d'évaluer l'exactitude et la rigueur de la présentation (parce que celle-ci relève par exemple d'un champ de savoirs complètement en dehors de leur discipline), soit constatent la totale vacuité des oraux présentés : exposés récités sans maitrise du fond, lecture ânonnée de contenu wikipédia, etc. Cette épreuve est une sinistre blague, tout de même assortie d'un coefficient 14 !
Pour le SNCL, il faut en finir avec ce gaspillage de temps et d'énergie qui ne fait que creuser l'inéquité entre les candidats. Le grand oral doit être supprimé.
Refus du PLE, refus des rattrapages et suppression du grand oral : trois mesures d'urgence pour sauver le baccalauréat français et éviter le naufrage de nos lycées que le SNCL portera en demande d'audience au ministère ! Si vous êtes d'accord avec nous, ne vous contentez-plus d'approuver, suivez-nous, aidez-nous à défendre notre vision exigeante de l'éducation ; adhérez !